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26 janvier 2023 4 26 /01 /janvier /2023 16:31
Ainsi parlait Célestine

Ainsi parlait Célestine

" Ainsi parlait Célestine " d'Alexis Legayet 160 pages Collection Borderline

Chapitre I


La nuit venait enfin de tomber. Francis tendit un long
moment l’oreille. Aucun bruit dans la maison. Il descendit
sur la pointe des pieds les marches de l’escalier, s’enveloppa
de sa veste de laine, puis ouvrit délicatement la porte. Chut !
Concentration totale... Ne pas trop bousculer cette vieille
quincaillerie. Mmmoui, c’est parfait !
se félicita-t-il. Pas même
une vibration. L’homme s’engouffra dehors. Ne restait plus
maintenant qu’à refermer la porte. Il avait la technique. En
tenant de l’index de la main gauche le battant et du pouce la
porte, on pouvait opérer une poussée quasi chirurgicale avec
l’autre main, et éviter ainsi tout bruit intempestif. Une goutte
de sueur perla sur son front blême. Encore un millimètre,
voilà... c’est fait !
Francis Durand souffla. La moindre erreur
tactique et c’en était fini. Il tendit à nouveau l’oreille, tout
en scrutant attentivement les ombres du jardin. Éclairés par
un réverbère, les arbres frétillaient sous une brise légère. Une
forme se détachait près du vieil acacia... Francis retint son souffle.

Mais non, c’était l’ombre d’une branche ondulant sous le
vent
; il n’y avait rien à craindre. On pouvait avancer. Toujours
sur la pointe des pieds, pour ne pas faire crisser le gravier, il
fit le tour de la maison et se tapit derrière le garage. Là, il
était invisible. Aucune fenêtre de sa maison, ni même de celle
des voisins, ne donnait en cet angle précis. Après s’être assuré,
une dernière fois, de ne pas avoir été suivi, Durand engouffra
sa main dans sa poche et, sourire rusé aux lèvres, y délogea
une boîte rectangulaire, tout tremblant d’émotion. L’heureuse
pénombre lui évita de rencontrer des yeux l’image de peau
pourrissante subtilement incrustée tout autour du paquet. Il
en tapota d’un doigt le fond et en tira une longue tige blanche
qu’il déposa délicatement entre ses lèvres, tout en fermant
les yeux. De l’autre main, il se mit à fouiller dans sa poche
intérieure. Et le vent du plaisir commença à tourner. Bon
Dieu, mais, où c’que j’l’ai foutu ?
Il était pourtant sûr de l’avoir
rangé là. Non, mais, c’est pas possible ! lança-t-il en palpant avec
frénésie ses vêtements. Et, soudain, une flamme vermeille
illumina la nuit.
« C’est ça que tu cherches, Papa ?
D’un geste réflexe, Durand arracha sa cigarette de sa bouche
et la broya dans sa main, pendant que, de l’autre, il faisait disparaître
le paquet interdit dans la poche de sa veste.
- Ah, c’est toi, ma chérie ? Tu... tu m’as fait peur. Qu’est-ce
que tu fais dehors ? lança-t-il en prenant l’air le plus détaché
qu’il lui était possible.
- Je prends l’air... l’air pollué. Et toi ?
- Moi aussi. Euh... tu n’as pas école demain ?
- Si. Et toi, tu ne vas pas au travail demain ?
- Si, oui aussi... Il faudrait peut-être aller se coucher.
- Peut-être, en effet. Il est tard.
- Bon, alors j’y vais. Tu me suis ? proposa Francis Durand,
en ébauchant un pas en direction de la maison.
- Papa ! l’arrêta net Céleste, d’un ton ferme et glacé.
- Oui, Célestine ?
- Donne-moi le paquet !
- Que... quel paquet ?
- Ne fais pas l’innocent, allez, donne-le-moi ! »
 

 

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